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« Bien, dit la baba Yaga… Tu vas travailler chez moi quelque temps : si je suis contente, je te donnerai du feu, sinon, je te mangerai ! »

Vassilissa la Belle 

 

Le cannibalisme est inextricable de notre image de Baba Yaga, sorcière dévorante des enfants innocents. Même quand elle aide le héros, on ne peut pas se permettre d’oublier son appétit pour la chair humaine : dans un même souffle elle s’engage à aider Vassilissa à obtenir du feu pour sa marâtre méchante, et menace de la manger. La baba Yaga cannibale est souvent presque monstrueuse ; son corps est énorme, son appétit prodigieux, elle aiguise ses dents d’acier en se préparant à dévorer sa victime.

 

Malgré la réputation effrayante de Baba Yaga, son cannibalisme reste toujours inachevé, contrecarré par l’astuce des héros malins. Parfois, comme le cas de Vassilissa, l’héroïne réussit à remplir les termes exigeants de l’affaire proposée par Baba Yaga, et donc à échapper à son sort anthropophagique. Parfois, c’est le protagoniste lui-même qui doit proposer des échanges pour assurer sa fuite. L’héroïne du conte type La baba Yaga donne de la nourriture aux serviteurs affamés de Baba Yaga, ceux qui l’aident à échapper en contrepartie. Le héros éponyme de La baba Yaga et Filiouchka persuade la fille de Baba Yaga par la ruse de monter dans le four à sa place. Baba Yaga mange le corps rôti de sa propre fille à la place de celui de sa victime désignée. Même quand elle arrive à remplir ses appétits cannibales, Baba Yaga ne mange que les victimes qui le méritent : la fille complice de La baba Yaga et Filiouchka, ou les parents négligents du Prince Ivan, le bébé sorciere et la petite sœur du soleil. Chez Baba Yaga donc, le cannibalisme, souvent une consommation transgressive et taboue, se conforme à la moralité essentielle des contes : les bons triomphent, et les méchants sont dévorés. 

Dents d’acier et enfants rôtis : Baba Yaga et le cannibalisme

 

Par Jane Sinnett-Smith

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