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Baba Yaga figure d’une sexualité hors norme ? Décrite tantôt « le sexe écumant », tantôt « les tétons enroulés à un crochet », on l’imaginerait volontiers jambes écartées, effrontée, offrant sans réserve ce spectacle au visiteur. Cette générosité, certains, artistes plus qu’intellectuels, ont osé la fouiller. On l’a ainsi représentée, en dessin ou au cinéma, comme une femme à la libido exacerbée et aux tendances sadiques, venant révéler à l’héroïne ses propres pulsions homosexuelles sadomasochistes.

Baba Yaga figure de proue du féminisme ? Voilà un autre fantasme répandu à son sujet. Celle qui ne porte pas le voile dans une Russie paysanne et orthodoxe entretient aussi une relation des plus ambivalentes avec ce que l’on nomme féminité. Face à son émancipation et son mépris manifeste des lois du genre, on a tôt fait de la rêver déroulant sa banderole en tête d’un cortège pour les droits des femmes, les cheveux en bataille. Citons pour témoin la célèbre Maison des Babayagas, où un groupe de femmes militantes ont choisi de vieillir entre elles.

 

Si Baba Yaga est reconnue pour être l’initiatrice d’un passage, notamment de l’infantile à la maturité, son rôle semble indéniable dans l’éducation sexuelle des jeunes gens, et surtout des filles. Son homologue des contes érotiques d’Afanassiev (non merveilleux) connaît bien les plaisirs de la chair et n’hésite pas à employer la manière forte pour l’enseigner aux jeunes filles, dont les yeux sont toujours bandés. Jouissez mesdemoiselles, mais n’en sachez pas trop. Baba Yaga elle aussi nous transmet un savoir sur les affinités existant entre féminin, intériorité et secret. Ce qu’il y a d’inquiétant dans l’érotisme de la Yaga est justement que la dimension du voile en est absente.

 

La psychanalyse peut ici nous servir. S’il ne peut s’agir de faire l’analyse psychologique de Baba Yaga, il peut être question des fantasmes et des constructions sociales qui s’attachent au personnage, et plus précisément concernant le féminin, énigme incessante au dévoilement condamnable.

La genre restitué. Une lecture psychanalytique de la question du féminin

dans Vassilissa la très belle

 

Par Aurore Spiteri

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